samedi 25 août 2007

APPEL A LA CONSCIENCE PROTESTANTE

Où sont passés les protestants au Congo?
Appel à la prise de conscience

La redondance de faits et gestes dans l’agir du protestantisme congolais, tel que nous le vivons aujourd’hui inquiète de son avenir. Il inquiète les protestants Congolais eux-mêmes ; il inquiète aussi d’autres peuples chrétiens qui croyaient trouver en ce protestantisme un exemple à suivre surtout dans la forme de son unité, sans cesse à construire, dans la diversité. Dans la plupart des pays du protestantisme, l’impact de celui-ci est très significatif dans la vie de populations. Quand le protestantisme se prononce sur un fait, vite celui-ci est doublement examiné pour éviter le scandale. Car depuis toujours, on sait trouver des traces qui indiquent que ce mouvement ou ce courant du Christianisme n’est pas le moindre dans l’histoire, et a toujours bouleversé le monde dans son idéologie. N’est- ce pas que son apport est grand dans l’âme de nombreuses Constitutions des pays qui ont une certaine suprématie au monde ? N’est-ce pas que le sens de la liberté et de la démocratie sont la prunelle de l’œil du protestantisme ?

Il sied de constater qu’à travers ce qui se fait comme lecture du protestantisme au Congo, on a tendance à se rendre compte de beaucoup de déviations, parfois, malheureusement bien entretenues. Entre ce qui se fait et ce qui devrait réellement se faire, l’écart est très considérable. Quelle conception avoir du protestant et du protestantisme tel que vécu au Congo par les Congolais mieux les églises protestantes du Congo? Ne faut-il pas orienter les protestants vers les sources de ce mouvement et aussi éveiller l’esprit critique de protestants du Congo pour qu’ils réfléchissent sur ce que doit être le contenu à donner à leur identité dans l’univers du Christianisme ? Les Congolais n’ont-ils pas reçu cette identité de l’Occident acquis à la Réforme ? Mais, où sont-ils passés, ces protestants du Congo, devant le reniement permanent de leur identité ?

Depuis 1878, le protestantisme avait une particularité identitaire au Congo. On savait d’emblée faire la différence entre ce courant du Christianisme et d’autres. Il avait sa nature, sa forme de vie, son ethos, son éthique, son style de culte, son identité hymnologique, sa manière de s’habiller, spécialement ses clergés, etc. Le protestantisme était toute une identité existentielle. Si ce courant chrétien ne pouvait pas égaler le catholicisme en nombre d’adhérents, du moins, il était un contrepoids important depuis l’époque léopoldienne.

Philippe Kabongo Mbaya a écrit un ouvrage important qui est intitulé L’Eglise du Christ au Zaïre, Formation et adaptation d’un protestantisme en situation de dictature. Cet ouvrage sera le document de base de cette réflexion en ce sens qu’il nous éclairera de sa lanterne dans ce questionnement que nous soulevons par rapport au protestantisme congolais. Dans son ouvrage Kabongo écrivait en 1992 ce qui suit :

« Le protestantisme congolais est, numériquement et institutionnellement, le deuxième groupe confessionnel dans l’ancien Congo belge. Talonnant le catholicisme, et largement au-dessus du kimbanguisme, l’ensemble protestant (Eglises, œuvres, institutions diverses, etc.) constitue une importante composante de la société. […] Il est également le plus important de toute l’Afrique noire et vient au premier rang des protestantismes francophones du monde »[1].

Mais une question nous hante. Comment se présente-t-il aujourd’hui, le protestantisme congolais ? Cette question soulève deux préalables qu’il nous faudra élucider : Qu’est-ce que le protestantisme ou qu’est-ce qu’un protestant? C’est quoi le protestantisme congolais ?

1. La quiddité du protestantisme

On peut comprendre que la quiddité de ce terme se trouve logée dans l’adjectif qui le crée : protestant. Ainsi, il nous sera aisé de commencer par examiner cet adjectif qui, d’ordinaire, ramassera le propos du protestantisme.

1.1 Le protestant. Origine et compréhension du terme

Ce terme dénote d'abord un adjectif relatif, à celui et celle ou ce qui proteste. Chrétienne, chrétien appartenant à religion reformée et qui rejette l'autorité du pape de Rome.[2] On y compte les anglicans, les calvinistes, les évangéliques, les luthériens, les presbytériens, les puritains (...). Leur pluralité forme dans leur ensemble ce qu'on peut appeler le protestantisme. En effet, le protestantisme est le fruit de la grande révolution, le séisme religieux qui a eu lieu en Allemagne en XVIè siècle sous la houlette de Martin Luther, moine catholique de l'ordre de Saint Augustin. Ce protestantisme de Luther bien que forgé pour de motifs religieux, il s'est vu changé et chargé par la révolte des paysans dont la situation sociale avait déjà provoqué des jacqueries en Angleterre et en France au XIVè siècle, en Frise, en Suisse et en Alsace vers 1490. C'est dans le cadre de la lutte pour l'abolition des droits seigneuriaux, la suppression du servage et la réduction des impôts et de corvées que le protestantisme s'est vue placé aussi sur le terrain politique et social alors que Luther le plaçait sur le plan exclusivement religieux. [3]

1.2.1 Compréhension historique

Dans le souci de bien cerner le sens et la signification du mot protestant, un recul dans l'historicité de la Réforme nous sera très avantageux. Il faut chercher et trouver le sens du mot protestant et sa signification dans le soutien légendaire des princes allemands qui avaient souscrit pour la cause de Martin Luther. Ils avaient bravé l'injonction qui leur avait été faite par l'empereur Charles Quint de condamner les doctrines de Luther. Nous sommes là à la diète de Spire, en 1529. Comme le fait observer Ellen G. White : "Le courage, la foi et la fermeté de ces hommes de Dieu ont assuré la liberté de conscience aux siècles suivants. Cette protestation mémorable, dont les principes constituant, l'essence même du protestantisme, donna son nom aux adhérents de la Réforme dans le monde entier". [4]

Cette déclaration ou mieux protestation solennelle que Ellen. G. White appelle "essence même du protestantisme" était rédigée et présentée devant l'assemblée nationale réunissant tous les princes. Et, sans tenir compte de l'absence du roi Ferdinand qui, après avoir annoncé les volontés de la hiérarchie et celle de la papauté, se retira sans donner aux adjuvants de Luther l'occasion de lui répondre, les princes déclarèrent:

Nous protestons par les présentes, devant Dieu, notre unique Créateur, Conservateur, Rédempteur et Sauveur, qui un jour sera notre juge, ainsi que devant tous les hommes et toutes les créatures, que, pour nous et pour les nôtres, nous ne consentons ni n'adhérons en aucune manière au décret proposé, dans la mesure où il est contraire à Dieu, à sa sainte parole, à notre bonne conscience et au salut de nos âmes. Quoi ! Nous déclarerions, en adhérant à cet édit, que si le Dieu tout-puissant appelle un homme à sa connaissance, cet homme n'est pas libre de la recevoir ! [5]

La déclaration de princes ajoute :

Il n'est de doctrine certaine que celle qui est conforme à la parole de Dieu, (...) Les Seigneur défend d'en enseigner une autre; (...) chaque texte de la Sainte Ecriture devant être expliqué par d'autres textes plus clairs, ce Saint Livre est, dans toutes les choses nécessaires au chrétien, facile et propre à dissiper les ténèbres. Nous sommes donc résolus, avec la grâce de Dieu, à maintenir la prédication pure et exclusive de sa seule parole, telle qu'elle est contenue dans les livres bibliques de l'Ancien et du Nouveau Testament, sans rien ajouter qui lui soit contraire. Cette parole est la seule vérité; elle est la norme assurée de toute doctrine et de toute vie, et ne peut jamais ni faillir ni se tromper. Celui qui bâtit sur ce fondement résistera à toute puissance de l'enfer, tandis que toutes les vanités humaines qu'on lui oppose tomberont devant la face de Dieu (...). Voilà pourquoi nous rejetons le joug qu'on nous impose. [6]

Au regard de cette déclaration de protestataire de la diète de Spire, dénotons l'esprit et le sens de la liberté mais aussi ceux du courage. Humainement influencés par le nationalisme allemand au côté de Luther, d'une part, et, spirituellement rencontrant et faisant leur les doctrines de Luther d'autre part, les princes allemands ont forgé par le contenu de leur célèbre protestation l'essence même du protestantisme. L'on comprend dès lors que cette déclaration confessante "s'élève contre deux abus de l'homme dans les choses de la foi : l'intrusion du magistrat civil et l'autorité arbitraire du clergé. A la place de ces deux abus, le protestantisme établit, en face du magistrat, le pouvoir de la conscience; et en face du clergé, l'autorité de la parole de Dieu...". [7]

Le texte récuse l'amalgame de choses entre le pouvoir civil et les choses divines. Et à l'instar des prophètes et des apôtres, il stipule qu’il faut obéir à Dieu plutôt qu'aux hommes. On comprend dès que le protestantisme priorise non seulement le fait de croire et celui de pratiquer la foi mais aussi la liberté d'exprimer librement ce que l'on estime être la vérité et conteste à quiconque le droit de l'en priver. Il trouve en la Bible la seule autorité suprême en la matière de la foi. Il prône la tolérance religieuse et affirme clairement le droit de tout homme à servir Dieu selon sa propre conscience. Par rapport à la Bible, l'Ecriture Sainte, Luther dira même que "tous les Pères de l'Eglise ne vaudraient pas contre un seul verset" car elle est au dessus de tous et à la base de notre foi. Elle doit toujours contrôler notre foi qui est l'expérience religieuse personnelle de tout homme.

Eu égard à tout ce qui précèdent, en rapport avec le protestantisme, on voit bien que c'est le protestantisme qui accueille les femmes et les hommes, leur enseigne le sens et le contenu de sola scriptura, sola gratia, sola gloria et sola fidei; leur communique les moeurs et le sens de la piété, l'amour de la vérité et l'obéissance à Dieu plutôt qu'aux hommes (...) comme c'est éloquemment prescrit dans le texte de protestation des princes qui en constitue son essence. Le protestantisme est donc une autre vision de la chrétienté dans le christianisme où la notion de la liberté sert de toile de fond. C'est de là que sortent depuis la Réforme les protestantes et protestants. Libérés de la soumission, ils jouissent de leur liberté. Et, comme l'explique Luther, qui se base du texte de 1 Co 9, 19 et celui de Rom 13, 8 qui ont trait à la liberté et à la soumission, en ces termes :

(...) on doit vivre la foi et l'amour chrétien dans une formule aussi saisissante et dialectique que celle-ci : le chrétien est en toutes choses un libre Seigneur, il n'est soumis à personne; en même temps l'homme chrétien est en toutes choses serviteur, il est soumis à tout le monde. [8]

C'est cela même l'éthique de l'être protestant. Et nous pouvons le dire à la suite de Roger Mehl que "les réformateurs visaient une réévaluation de la doctrine chrétienne"[9] dans leur combat. C’est ainsi que le protestantisme ne peut réellement se comprendre et se vivre fondamentalement que la vision de la sauvegarde de la doctrine chrétienne.

2. Protestantisme congolais

Le protestantisme congolais, héritier et fruit de l’évangélisation des groupes protestants à la fin des années trente, est en quelque sorte la structuration des communautés chrétiennes congolaises telles qu’organisées depuis les stations missionnaires. Ces stations qui, aux temps des missionnaires, « loin d’être des îlots, fermées sur elles-mêmes, il s’agissait en fait- comme chez les catholiques- de centres de rayonnement d’où partait le mouvement d’évangélisation vers les régions avoisinantes ».[10] Il faut dire que les méandres de l’avènement du protestantisme congolais nous peuvent nous révéler de choses importantes. C’est ainsi que Kabongo Mbaya peut encore dire par rapport aux causes lointaines de l’avènement du protestantisme congolais que :

« Le développement des communautés autochtones protestantes, sous l’égide d’institutions missionnaires différentes et pluralistes, posait malgré tout la problématique de la finalité de l’œuvre missionnaire. Devait-elle reproduire le dénominationalisme qui caractérisait les sociétés missionnaires évangéliques, ou plutôt conduire à la constitution d’une entité ecclésiale supra-dénominationnelle ? ».[11]

A en croire notre auteur, les missions ont beaucoup lutté contre l’esprit le dénominationalisme. L’histoire nous rapporte que l’un des dirigeants les plus respectés de l’ « American Baptist Mission », le Révérend P.A MC Diarmid, disait : « Nous avons des milliers de convertis, mais aucun d’eux ne connaît les mots « Dénomination Baptiste » Ils s’appellent »Hommes de Dieu » (ou du Christ), « Enfants de Dieu »( ou du Christ). A Luebo, ils utilisent (ces) mêmes termes ; à Boma, Bolenge,Yakusu, Lusambo et Niangara, c’est la même chose ; on insiste sur le fait que nous sommes unis, et non divisés, en Christ ; en étant un seul corps dont il est la tête ».[12]

On voit en filigrane, le souci de l’édification de l’Eglise autochtone mais protestante au Congo qui se dessinait déjà. Mais une Eglise qui soit non-dénominationnelle, unie entre les chrétiens, pas trop versée dans une hiérarchisation qui ferait souffrir les libertés individuelles et ecclésiastiques. De ce fait, cette Eglise du protestantisme, contrairement au modèle catholique qui priorisait la hiérarchie, et de par son ecclésiologie, elle (l’Eglise protestante) avait choisi d’obéir aux évidences du protestantisme anglo-saxon ou mieux de l’Eglise dans tout protestantisme: c’est-à-dire une forte dose de conscience du caractère « scripturo-centrique » de l’Eglise et de sa nature toujours laïque. Mais une question peut se poser : Comment l’unification du protestantisme congolais a pu s’accomplir ?

Pour répondre à cette question, il va falloir faire un survol historique rapide des faits essentiels qui ont accompagné cette unification ou ce rassemblement pour un protestantisme congolais même si cela sera fait de façon non exhaustive. C’est le souci d’appréhender les éléments qui nous permettront de répondre à notre grande question de « Où sont passés les protestants au Congo ? » que nous le faisons.

2.1 Le protestantisme congolais et ses premières
structures unitaires


On sait que le Congo a appartenu personnellement et sans partage à Léopold II de 1885 à 1908. A sa mort, le souverain belge légua son paradis à la Belgique. Le parlement belge, après quelques hésitations, accepta de reprendre la tutelle de la colonie et cela de 1908 à 1960. Il faut se rappeler que des nombreuses missions s’implantèrent au Congo pendant cette période jusqu’à la Première guerre mondiale. Si la Belgique avait eu pour devise l’union fait la force, le besoin profond de l’union pour avoir une force se ressentait dans l’âme des missionnaires protestants qui étaient tous confrontés à la montée de l’hostilité sans nom des missions catholiques d’une part et mais aussi la lutte pour survivance face à la politique coloniale qui était manifestement à leur détriment. C’est ici que se trouve être les origines des premières structures d’unité et de concertation entre missions protestantes sous la pesanteur de l’Etat colonial et les missions catholiques dites nationales par l’Etat léopoldien qui, sans s’engager ouvertement à interdire la présence et les activités protestantes, contrecarrait simplement le travail des protestants. On se souviendra qu’il le faisait en réservant son soutien et ses largesses aux seules missions catholiques belges. C’est ici qu’on institutionnalisera la discrimination rendue manifeste en des appellations comme « missions nationales » et « missions étrangères ».

Ces injustices officielles faites contre les missions protestantes au Congo renforcèrent sans doute la quête de l’union fait la force dans l’agir de ces dernières. D’ailleurs, bien avant, en 1902 déjà, sous le règne de Léopold II les missions protestantes organisèrent leur toute première rencontre du 18 au 21 janvier. Ce fut un colloque qui se tint à Stanley-Pool (actuel Kinshasa) réunissant les représentants de huit associations protestantes, à savoir[13] : ABMU ( American Baptist Mission Union) aujourd’hui Communauté Baptiste du Congo Ouest CBCO, APCM ( American Presbyterian Congo Mission) aujourd’hui Communauté Presbytérienne au Congo, BMS (Baptist Missionary Society) aujourd’hui la Communauté Baptiste du Fleuve Congo, CBFC, CBM (Congo Balolo Mission), CMA ( Christian and Missionary Alliance) aujourd’hui Communauté des Eglises Evangéliques de l’Alliance, CEAC, FCMS (Foreign Christian Missionary Society de « Disciple of Christ », SMF ( Svenska Missions Förbundet) et WM ( Westcott Mission) avec pour thème général : « Tous unis en Christ Jésus ».[14]

Il faut dire avec Irvine cité par Kabongo Mbaya que la pratique de ces rencontres s’institutionnalisait par le biais d’une organisation à caractère fraternel et informel : la conférence générale des Missions protestantes au Congo. Les missions protestantes continuèrent à se retrouver dans le cadre de cette instance jusqu’en 1911, à raison d’une conférence tous les deux ans, sauf pendant la Première guerre mondiale.[15]
A Bolenge en 1911 lors de la conférence générale des Missions protestantes au Congo deux décisions importantes concernant la vie et les activités du protestantisme seront prises, à savoir :


1) La création du Comité de continuation au Congo, en conformité avec les recommandations de la Conférence internationale missionnaire d’Edimbourg de 1910. Signalons qu’avec l’avènement de ce comité, la Conférence générale des Missions protestantes au Congo disparaissait comme entité terminologique.

2) L’édition d’un journal, Congo Mission News. Ces deux actes et bien d’autres encore montrèrent combien l’engagement de la des missions protestantes vers l’unité et la coopération était désormais en marche en avant.

C’est seulement vers les années vingt, mieux en 1924 que dans une des résolutions du Comité de continuation, celui-ci se transformera en un Conseil protestant et nombreux auteurs pensent que l’adjectif « protestant » vient ici indiquer l’image de difficultés de coexistence que les protestants avaient avec les catholiques. Mais la création de ce conseil nécessita une demande de sa reconnaissance légale belge. Selon une lettre du ministre des Colonies, datant du 25 février 1920, n°7 Direction comme aussi celle du Gouverneur général, du 16 avril 1920, n° 267 citées dans les lettres des Colonies du 16 Novembre 1929 adressée au Gouverneur général, cette démarche d’une reconnaissance qui avait été entreprise depuis 1920 demeura vaine. Car l’Administration coloniale ne voyait pas d’un bon œil cette tentative de fédération des associations protestantes[16].

Enfin, un mal nécessaire fut trouvé dans les méandres de la naissance officielle du Conseil protestant du Congo. C’est la deuxième guerre mondiale deuxième guerre (40-45) avec l’occupation de la Belgique par la Nazie. Cette occupation regrettable forcera le gouvernement belge à se réfugier à Londres chez les Anglais. Et là , avec la pression des protestants de milieux britanniques sur ce Gouvernement en exil l’ ordonnance tant attendue sera signée par le Vice Gouverneur général P.Ermens en vue de la reconnaissance du Conseil protestant du Congo, en sigle CPC. C’était le 23 avril 1941.[17]

Il est avantageux d’indiquer que le CPC, dans l’esprit et la lettre de l’ordonnance qui le créa, était et devait demeurer un organisme sans aucun pouvoir sur les missions membres, son autorité étant strictement consultative[18].

2.2 Le protestantisme congolais et ses combats
sous la houlette du CPC

Le Conseil protestant au Congo comme structure unitaire, représentant et défenseur des intérêts du protestantisme au Congo avait réussi à arracher nombre de petites victoires- même si non spectaculaires- mais qui méritent qu’on les relève si l’on veut passer au crible de la raison d’être, du travail, mieux du rôle que joue le protestantisme d’aujourd’hui au Congo.

Dans un environnement pro-catholique sur le plan religieux, politique, social sous Léopold II et même pire sous le gouvernement Colonial belge, le protestantisme au Congo avec le CPC avait essayé de contourner un certain nombre de situations difficiles. Dans cet appel à la conscience des protestants nous en relevons 16 défis relevés que nous tirons de l’ouvrage de Kabongo Mbaya, à savoir :

1. La résistance intelligente et militante organisée des protestants face à la poussée de la campagne de l’anti-protestantisme pratique et doctrinaire voire l’hostilité des missionnaires catholiques et de leurs adeptes qui travaillaient nuit et jour pour réduire à néant les efforts du protestantisme[19].

2. De la résistance face à l’anti-protestantisme au Congo de l’époque coloniale depuis 1908. Car il ne faut pas perdre de vue que le protestantisme est arrivé au Congo bien avant que le Congo soit officiellement le paradis privé de Léopold II qui prend ses origines à la conférence de Berlin de 1885.

3. De la lutte pour que les protestants organisent leurs propres écoles avec droit conséquenciel de délivrer des diplômes aux élèves méritants.[20]

4. De la poussée de l’œuvre médicale protestante bien que sans assistance subsidiaire du gouvernement Colonial qui ne finançait que les écoles catholiques.[21]

5. Du refus de céder à la pression et l’embargo que leur faisait subir le gouvernement Colonial entre les années 1920 et 1930 aux fins de provoquer la limitation de l’expansion du protestantisme au Congo. Cela étant l’œuvre influencée par les missions catholiques, les privilégiées du gouvernement Colonial, l’envoi au Congo d’un délégué apostolique de premier rang en la personne de Mgr G. Dellepiane ne fera que renforcer l’hostilité sans affaiblir les efforts de la lutte des protestants.[22]

6. De retombés de la Conférence jubilaire des Missions Protestantes à Léopoldville du 15-23 septembre 1928 qui rallumera les efforts pour l’autonomie de l’Eglise locale qui est l’unité de l’indépendance ecclésiastique comme la famille est l’unité de l’édifice social.[23]

7. De questions de l’indépendance du Congo qui commençaient déjà à s’inviter dans l’ordre du jour de rencontres de missionnaires qui craignaient que les indigènes soient un jour portés à les critiquer et perdre ainsi la confiance en eux bien que les mouvements indépendants prématurés pointaient à l’horizon au Bas –Congo avec le Kimbanguisme[24].

8. De la vision éclairée pour ne pas affecter les institutions missionnaires elles-mêmes dans une sorte de logique fusionnelle, le CPC depuis 1928, privilégiait la coopération et la solidarité entre missions en présence au Congo[25].

9. De la détermination de pas avoir peur mais peut être de faire peur incarnait l’âme du protestantisme au Congo. Il attirait déjà l’attention de l’autorité coloniale, car les questions doctrinales mises de côté, les Eglises indigènes commençaient à délibérer en commun sur les devoirs de leur communauté d’intérêts spirituels, matériels, sociaux voire politique avec une clairvoyance parfaite[26].

10. Même si l’enseignement dispensé par le réseau scolaire protestant a eu pendant longtemps une réputation plutôt négative, l’action médicale et sanitaire des missions protestantes par contre a bénéficié de l’admiration de beaucoup.[27]

11. Le cadre protestant de communauté d’action,le CPC sans devenir le lieu institutionnel de l’attestation de l’Eglise du Christ au Congo, pour que chaque mission sollicite l’admission au conseil en souscrivant à l’objectif fondamental du CPC : bâtir une Eglise où quiconque disait ce qui allait être contribuait à faire être ce qu’il disait.[28]

12. Le déploiement de la campagne pour la lutte protestante pour l’égalité sociale par le CPC, spécialement dans le domaine de l’éducation[29].

13. Le protestantisme au Congo a fait preuve de son engagement dans la dénonciation par les missions évangéliques contre la politique léopoldienne qui déshumanisait par des cruautés sans nom les autochtones Congolais.[30]

14. Même si jusqu’à la fin des années 1940, les protestants accusaient un grand retard historique face à la puissance socioculturelle catholique, il faut reconnaître que les années 1950et 1960sont celles qui présageait déjà la fin possible de l’ordre belge au Congo. Le CPC avait réussi, à la veille de l’accession du Congo à l’indépendance souveraine, à jouer sérieusement son rôle de leader dans l’imagination par l’apparition d’une dynamique associative du laïcat protestant Congolais qui, à son tour, jouera de rôle non moins important à la table ronde de Bruxelles et même à l’indépendance du Congo.[31]

15. En 1960, le protestantisme s’impose malgré tout au Congo. On y rencontre des cadres Congolais (Clercs et laïcs) qui sont désormais membres du Conseil, voire à la tête du Conseil protestant au Congo. 1). On cite le Pasteur Mawanda (SMF) élu comme vice-président, les Méthodistes engagés comme P.Shaumba et J. Bulaya et plus tard avant et pendant les mutations du CPC qui se transformerait en ECC, le Pasteur J. Bokeleale et les autres conduiront prendront le commandement de ce Conseil. 2). En politique, deux protestants émergeront. Ce sont Emery Patrice Lumumba et Moïse Tsombé, tous deux Méthodistes. Mais on retiendra aussi J.Sendwe, I. Kalonji les deux qui n’étaient pas d’importance mineure. 3). Si les protestants avaient eu ce privilège d’être deux à la tête de la Nation, un seul catholique fut J. Kasavubu et au délà de ce qui était arrivé dans leurs conflits, faut-il ignorer ceux de l’ordre religieux ? 4). La création de l’Association des Amis des Missions protestantes du Congo qui s’est vue s’élargir sur l’ensemble du vaste étendue de missions et villes où il y a des protestants. L’histoire nous renseigne que ce fut J. Ekofo qui pour la toute première fois fonda l’AMIPRO au Congo en 1946.

Bouclons ces efforts du protestantisme au Congo sous l’égide du CPC par une note sombre qui ne manquera pas à susciter quelques interrogations en nous.

16. De la position quelque peu floue- si pas totalement floue- des Eglises protestantes dans les tout premiers jours du régime du Général Mobutu. C’est le point de départ mieux le nouveau départ du protestantisme avec un silence très remarquable et cela contrairement à l’éthos que le CPC s’était donné corps et âme depuis les années léopoldiennes. Tenez. Mobutu est venu au pouvoir par un coup d’Etat le 24 Novembre 1965. Jusqu’à 7 mois après, précisément le 30 juin 1966, dans sa prédication, le Pasteur P. Shaumba alors Président du CPC ne citera même pas un seul instant le nom de Mobutu ni celui du nouveau régime[32].

Question. Etait-il le début de la neutralité pour le souci de la non ingérence dans les affaires de l’Etat ou le point de départ de la complicité du CPC avec le régime qui atteindra son point culminant avec l’arrivée du Pasteur J. Bokeleale à la tête du CPC qui se transformera et transformera avec lui l’esprit les objectifs de lutte pour le protestantisme et ses intérêts spirituels, matériels, sociaux et politique pour ne viser que l’esprit de Ein volk, ein Führer, ein Reich avec la naissance plus tard de cette institution que nous appelons Eglise du Christ au Congo du type 1971 … qui malheureusement semble toujours au service de chaque pouvoir en place 36 ans après.

3. Protestantisme au Congo et
ses caractéristiques d’aujourd’hui

Dans les lignes qui suivent, nous aimerions voir si dans l’agir, l’être et le dire de notre protestantisme d’aujourd’hui il reste encore quelque chose de protestant selon l’esprit qui animait son âme depuis les temps du CPC. Le tableau des résumés de réalisations ou des déterminations rendues en des actions de résistances ou positionnement pour l’intérêt général du protestantisme ne pourra que nous mettre dans la confusion. La raison est simple : entre ce que fait le protestantisme au Congo et ce qu’il devrait réellement faire, entre son silence de fois complice et l’esprit de protestation protestante il y a un écart considération. Nous retiendrons quelques faits non exhaustifs.

1. Du manque de la visibilité du protestantisme dans le positionnement lors de grandes questions de non respect de droits humains.

2. De l’absence de l’esprit de la résistance qui l’animait depuis l’époque coloniale depuis 1908. Car il ne faut pas perdre de vue que les protestants sont les premiers à arriver au Congo et cela bien avant que le Congo soit officiellement le paradis privé de Léopold II qui prend ses origines à la conférence de Berlin de 1885.

3. Plus d’ambition chez les protestants pour l’augmentation du nombre de leurs propres écoles. La plupart des écoles qu’on a sont celles créées depuis les années de la fin du CPC.

4. Plus de la poussée de l’œuvre médicale protestante. Le nombre des hôpitaux protestants à la capitale par.ex est non significatif.

5. L’affaiblissement de l’effort dans l’expansion du protestantisme au Congo. Nous gardons encore la cartographie missionnaire de notre étendue.

6. Du reniement presque manifeste des retombés de la Conférence jubilaire des Missions Protestantes à Léopoldville du 15-23 septembre 1928 qui allumait les efforts pour l’autonomie de l’Eglise locale qui est l’unité de l’indépendance ecclésiastique comme la famille est l’unité de l’édifice social. L’Eglise locale n’a presque plus de parole.

7. Si hier les questions de l’indépendance politique du Congo s’invitaient dans l’ordre du jour de rencontres de leaders protestants qui craignaient que les indigènes soient un jour portés à les critiquer et perdre ainsi la confiance en eux, aujourd’hui c’est plus le cas et quand il arrive que l’on en parle, c’est du côté du pouvoir qu’on se place.

8. Si hier, et cela depuis 1928, la vision du CPC était éclairée pour ne pas affecter les institutions missionnaires elles-mêmes dans une sorte de logique fusionnelle, mais privilégiait la coopération et la solidarité entre missions en présence au Congo, aujourd’hui les faits qui prouvent que c’est le fusionnisme qui prime sont criants.

9. De la détermination de ne pas avoir peur mais peut être de faire peur incarnait l’âme du protestantisme au Congo a disparu. On ne sait plus attirer l’attention de l’autorité politique sur le bien être de nos populations et surtout sur le sens du commun sur les devoirs de leur communauté d’intérêts spirituels, matériels, sociaux voire politique avec une clairvoyance parfaite.

10. L’enseignement dispensé par le réseau scolaire protestant dans l’ensemble a encore quelque réputation plutôt négative et l’action médicale et sanitaire des missions protestantes ne bénéficie plus de l’admiration d’antan.

11. Le cadre protestant de communauté d’action, l’ECC l’ancien CPC est devenu beaucoup plus le lieu institutionnel de l’attestation de l’Eglise du protestantisme au Congo, pour que chaque communauté ne puisse évoluer sans elle en souscrivant à son objectif fondamental : bâtir une Eglise où quiconque dira et fera même ce qui ne se dit ni ne se fait chez les protestants. Chacun contribue à faire être ce qu’il n’est pas protestant mais on l’accepte.

12. Le protestantisme au Congo ne fait plus preuve de son engagement dans la dénonciation, renonciation contre le pouvoir car elle en fait partie.

13. Si hier jusqu’à la fin des années 1940, les protestants accusaient un grand retard historique face à la puissance socioculturelle catholique, et que les efforts des années 1950 et 1960 ont conduit le laïcat protestant à jouer sérieusement son rôle de leader à la table ronde de Bruxelles et même à l’indépendance du Congo, aujourd’hui le laïcat protestant en hibernation si pas déjà mort.

14. De 1960 à ces jours on a eu que des cadres Congolais (Clercs et laïcs) comme membres du Conseil, voire à la tête du Conseil protestant au Congo aujourd’hui ECC. On cite le Pasteur Mawanda (SMF) élu comme vice-président, les Méthodistes engagés comme P.Shaumba et J. Bulaya, le Pasteur J. Bokeleale, aujourd’hui l’Evêque P. Marini et les autres ont pris le commandement de ce Conseil. Qu’ont-ils réellement fait qui puisse surpasser les missionnaires d’hier par rapport à l’ensemble des principes protestants ? Et sur le plan politique, deux protestants avaient émergé. C’étaient Emery Patrice Lumumba et Moïse Tsombé, tous deux Méthodistes et laïcs protestants de l’Amipro. Mais on rappellera aussi les noms de J.Sendwe, I. Kalonji tous deux qui n’étaient pas d’importance mineure dans les méandres de l’accession du Congo à l’indépendance. Où sont-ils passés pour qu’ils ne soient pas suivis dans le témoignage de leur esprit protestant qui manque aujourd’hui ?

15. La continuation de la position quelque peu floue- si pas totalement floue- des Eglises protestantes dans les tout premiers jours du régime du Général Mobutu est ce qui se fait jusqu’aujourd’hui. Le règne de la loi du silence et de la non assistance de la nation en danger, du non assistance du protestantisme en perte de symbole d’identité et de personnalité. C’est le point de départ mieux le nouveau départ du protestantisme avec un silence très remarquable et cela contrairement à l’éthos que le CPC s’était donné corps et âme depuis les années léopoldiennes. Tenez. De la même manière le Pasteur P. Shaumba, alors Président du CPC ne citera même pas un seul instant le nom de Mobutu ni celui du nouveau régime de Mobutu qui est venu au pouvoir par un coup d’Etat le 24 Novembre 1965 dans sa prédication 7 mois après, précisément le 30 juin 1966, de la même manière J. Bokeleale a fait avec Mobutu et de la même fera P. Marini. Peut être lui un peu plus. Car au lieu et place d’un laïc, il se laissera aller dans une position délicate et se présentera lui-même comme acteur politique de premier plan au Sénat de la Transition.

4. Où sont passés les protestants Congolais?

Dans ces lignes, j’aimerais me poser, à titre de conclusion, des questions pour les quelles je n’ai pas de réponses toute faites. Car chacun peut trouver ses propres réponses à ces questions qui peuvent nous intéresser nous tous comme protestants.

Où sont passés les protestants ? Sont-ils engloutis dans les décombres de la maison qui transforma l’esprit et les objectifs de lutte pour un protestantisme fort et ses intérêts spirituels, matériels, sociaux et politique pour ne viser que l’esprit de Ein volk, ein Führer, ein Reich dans l’agir de cette institution que nous appelons Eglise du Christ au Congo du type 1971 … qui malheureusement est devenue elle-même une fusion des Eglises, une Eglise locale, une Eglise pour le pouvoir sans trop travailler à l’émergence des laïcs dans la gestion du res publica …mais toujours au service de chaque pouvoir en place 36 ans après. Où est passé le protestantisme au Congo ? Est –il annexé au régime en place pour cesser d’être une dynamique socio-réligieuse attachée à la liberté, au pluralisme et porteuse des grandes innovations fondatrices de choses nouvelles ? Où est passé l’esprit protestant, ferment des mouvements d’émancipation et de résistance qui militait contre les cruautés de l’ordre colonial ? Où est passé le protestantisme du non conformisme qui luttait contre la loi du silence devant les injustices sociales ? Où sont passés les protestants qui protestaient contre la légèreté ? Où est passée l’éthique qui faisait la différence entre les protestants et ceux qui ne le sont pas ?

Voilà mon appel à la conscience protestante. Si le protestantisme devrait demeurer et dormir sur son lit douillet de conservatisme au Congo d’aujourd’hui, je proposerais plutôt le conservatisme de l’esprit et de la liberté protestants pour retrouver les traces de ceux que je ne cesse de chercher : les protestants.

Notes


[1] Philippe KABONGO B. Mbaya., L’Eglise du Christ au Zaïre, Formation et adaptation d’un protestantisme en situation de dictature, Paris, Karthala, 1992, p. 7.
[2] Dictionnaire Robert méthodique, Paris, Ed. Larousse, 1983, p. 1148.
[3] Louis EMERY, Histoire du christianisme, Bruxelles, Imprimerie Mathieu, 1954, p.99.
[4] Ellen G. WHITE, La tragédie des siècles, Idaho, Pacific press, 1990, p. 207.
[5] Ibid., p. 213.
[6] Ibid., pp. 213-214.
[7] Ibid.
[8] Martin LUTHER, De la liberté du chrétien, Paris, Aubier Montaigne, 1969, p. 43.
[9] Roger MEHL, La théologie protestante, Coll. Que sais-je ? N° 1230, Paris, Presses universitaires de France, 1967, p. 5.
[10] Cf. KABONGO Mbaya, op.cit., p.21.
[11] Ibid., p.22.
[12] Ibid. KABONGO cite les paroles du Rév. P.A Diarmid ce pasteur Représentant de la BMS au Congo.
[13] Beaucoup des anciennes Missions ont changé d’appellation. Ainsi, aujourd’hui : ABMU (American Baptist Mission Union) aujourd’hui Communauté Baptiste du Congo Ouest CBCO, APCM (American Presbyterian Congo Mission) aujourd’hui Communauté Presbytérienne au Congo, BMS (Baptist Missionary Society) aujourd’hui la Communauté Baptiste du Fleuve Congo, CBFC. CMA (Christian and Missionary Alliance) aujourd’hui Communauté des Eglises Evangéliques de l’Alliance, CEAC, FCMS (Foreign Christian Missionary Society de « Disciple of Christ » Communauté des Disciples du Christ au Congo, CDCC SMF (Svenska Missions Förbundet), aujourd’hui Communauté Evangélique au Congo, CEC…
[14] Cf. Lire les travaux de KABONGO Mbaya pour en savoir plus sur ce cheminement.
[15] Ibid., p.18.
[16] Ibid., p.19
[17] Ibid.
[18] Ibid.
[19] Ibid., p.28.
[20] Ibid., p.37.
[21] Ibid.
[22] Ibid., p.40.
[23] Ibid., p.48.
[24] Ibid., p.49.
[25] Ibid., p.55.
[26] Ibid., p.60.
[27] Ibid., p.26
[28] Ibid., p.67.
[29] Ibid., p.70.
[30] Ibid., p.74.
[31] Ibid., p.81.
[32] Ibid., p.125.

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